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          INTERVIEW DE KAMINI Made in Picardie

          INTERVIEW DE KAMINI

          Il y a quelques semaines, nos boîtes mails étaient envahies par le clip d'un drôle d'énergumène rappant au beau milieu des champs. Effet boule de neige oblige, 'Marly-Gomont' est devenu l'objet de toutes les curiosités. Mais qui se cache derrière tout ça ? Rencontre avec… un phénomène !

          Cheveux en pétard et sourire avenant, Kamini n'a pas encore vraiment réalisé ce qui lui arrivait. De plateaux télé en studios d'enregistrement, il se balade sans se prendre la tête. Mais attention : derrière le mec cool se cache un vrai bosseur, qui sait ce qu'il veut.

          'Marly-Gomont' n'était au départ qu'un clip promotionnel destiné à démarcher les maisons de disques. Raconte-nous comment tout s'est emballé ?

          On a envoyé la vidéo aux majors fin août, et c'est à partir du 12 septembre que ça a commencé. On avait envoyé un lien privé, juste pour les pros. On savait que c'était original et que ça n'avait jamais était fait, donc on ne voulait pas que ça parte dans tous les sens. Mais c'est quand même parti dans tous les sens ! Donc le 12, le clip se retrouve en téléchargement sur Internet, et les gens commencent à laisser des commentaires. Très vite, avec Emilie Desbonnet, qui a fait le montage, on ne maîtrise plus ce qui se passe. Mais en voyant le nombre de messages, on a préféré laisser faire. Ensuite, ça s'est enchaîné. Le 13 Cauet m'appelle pour que je vienne à la radio, le 22 j'y suis, le 23 je crée le site officiel Kamini.fr, il explose, après c'est Canal +, TF1, Karl Zéro, France 2, France 3… Du coup, comme je le dis souvent, mon rapport avec la presse est faussé, dans le sens où les gens n'ont pas reçu ma vidéo de façon vraiment professionnelle. Leur patron n'est pas venu leur confier le projet. Ils ont plutôt reçu un mail avec pour objet "Regarde ça c'est trop bon" alors qu'ils étaient chez eux en peignoir, et ils n'ont même pas eu le temps de faire marcher leur esprit critique. Ca a plutôt joué en ma faveur puisque les journalistes m'ont plus encensé qu'écrabouillé, mais ils m'ont aussi collé un peu vite l'étiquette de "rappeur campagnard". Je ne leur en veux pas, parce qu'au début, il n'y avait que la vidéo, pas de biographie, pas de photos, pas d'infos, rien quoi. Le mec voit un mec, un black, qui rappe à la campagne, donc il parle de rap campagnard, je ne peux pas lui en vouloir. Mais je tiens à dire que ce n'est pas du rap "campagnard". C'est du rap, mais de par mon vécu, le contenu est forcément différent.

          On voit dans le clip des habitants de Marly-Gomont. Comment a été accueilli ton projet, puis ton succès, au village ?

          Pour le projet il y en a qui voulaient bien participer, d'autres pas, mais ceux qui n'ont pas voulu maintenant le regrettent ! Sinon les gens du village sont super contents, ils sont fiers, ils viennent me féliciter. Il y a un papi qui est venu me dire "C'est bien, gamin", un mec de 70 ans, c'est fou quand même. C'est aussi parce que des petits patelins en France il y en a plein, plus que des cités forcément, alors les gens se retrouvent là-dedans. C'est génial comme aventure.

          Derrière l'humour, on sent poindre des thèmes sensibles…

          Bien sûr. Je n'allais pas faire un album avec douze chansons qui disent que tout va bien, la vie n'est pas comme ça. Je parle de mon vécu. Pour les gens, pour faire du rap, il faut forcément avoir tué quelqu'un, volé un truc ou se battre, or non. Mon vécu je l'ai, j'ai vu des femmes à qui l'on dit qu'elles ont une tumeur, et c'est aussi dur. Ca c'est mon vécu à moi. Il ne faut pas forcément vivre dans la violence ou dans la rue pour rapper.

          Le moins qu'on puisse dire, c'est que ton clip, comme ton titre, dénotent dans l'univers du rap. Est-ce le fruit de ta volonté ? Te revendiques-tu "rappeur" ?

          La vidéo, je ne pouvais pas la faire autrement. Dans le texte je dis "Je m'appelle Kamini, je viens pas de la té-ci, je viens d'un petit village qui s'appelle Marly-Gomont." Au moment où je l'ai écrit, ça me paraissait évident. Je vis à Marly, on filme les gens, on filme le village, on filme les vaches, la vérité quoi. Les gens disent que c'est marrant parce qu'à la place des Mercedes il y a des tracteurs, et en plus c'est vrai, mais je ne l'ai pas fait exprès ! J'ai tendance à dire que je fais du rap, mais les gens me posent souvent ce genre de question, ce qui me fait penser qu'ils sous-entendent que ce n'est peut-être pas du rap. Alors je me dis que c'est parce que le contenu est différent. Si je dois le définir autrement que du rap, je dirais que c'est du pop-rap. Mais moi, si on me demande ce que c'est, je dis que c'est du rap.

          Une jeune femme semble liée de près à ton projet, Emilie Desbonnet. Veux-tu nous en dire un peu plus sur son rôle ?

          Emilie est graphiste. Quand je l'ai rencontrée, je savais qu'elle faisait des clips, alors je lui ai dit qu'un jour on en ferait un ensemble. Mais je voulais finir ma scolarité d'abord, et être infirmier, pour pouvoir faire un peu de production et de la "zic" tranquillement. Alors j'ai passé mon diplôme et puis j'ai été la voir et je lui ai expliqué ce que je voulais qu'on fasse. Résultat, moi je suis à la réalisation et au scénario, et elle est à la réalisation et au montage. On a tourné ça en trois jours et on s'est bien marrés. Elle a halluciné en voyant le résultat ! Elle m'a dit qu'elle savait que j'avais du talent, mais qu'elle ne pensait pas que je l'amènerais jusque-là !

          Ton premier single est sorti depuis maintenant quelques jours. Quel accueil as-tu reçu de la part du public, internautes ou non ?

          On est bien classés, mais il y a de la concurrence… L'accueil est terrible, les gens sont terribles ! Sur 5.000 commentaires, j'en ai eu dix à tout casser qui ne sont pas positifs. C'est vraiment rare, c'est même rarissime. Moi j'hallucine ! Je suis sur un drôle de nuage, alors je garde mon boulot d'infirmier parce que c'est le seul moment où j'atterris. Même quand je suis avec mes potes, on est encore sur le cul. Il n'y a que le boulot et ma condition sociale qui me raccrochent vraiment à la réalité. Sinon je suis entouré de belles femmes, je rencontre des journalistes, enfin ce n'est pas la même vie qu'il y a quelque temps… sauf que je côtoyais déjà des belles femmes ! Il y a aussi des gens qui me sortent des trucs incroyables, comme Jean-Pierre Mocky qui m'a proposé pendant une émission un rôle dans un film avec Jean Dujardin. Enfin je ne sais pas si c'est vrai, mais d'après Bruno Solo, qui est venu me voir dans ma loge, il était sérieux ! Tous ces trucs tu ne te les imagines pas, même si tu as confiance en toi artistiquement.

          A t'écouter, on sent que tu es aussi un peu comique, et 'Marly-Gomont' ressemble assez à un délire entre potes. Est-ce une piste que tu pourrais explorer ?

          Comme je l'ai dit, au départ, les gens ouvraient la page et il n'y avait que le clip, rien d'autre. Alors forcément, ils ont pu laisser libre cours à leur propre interprétation, et beaucoup ont cru que c'était un délire. Mais ce n'est pas un délire ! Pour l'instant, je vais déjà faire ce que j'ai à faire en musique. J'ai deux albums à sortir, c'est dans le contrat, et je veux qu'ils soient forts. Après j'ai peut-être certaines capacités à faire autre chose, mais faut y aller étape par étape. J'ai peut-être un potentiel, mais c'est un boulot monstrueux. Par exemple, pour mes cheveux, les gens sont souvent étonnés, mais je savais très bien que si dans le clip de 'Marly-Gomont' on me voyait avec le crâne rasé - comme je l'avais avant - ça n'aurait pas été aussi marrant. Mais je crois que je n'ai pas encore les capacités pour faire du one-man show, il faudrait déjà que je sois plus sûr de moi. Il y a plein de choses qui font que je ne suis pas encore prêt. Il y a un boulot monstrueux.

          Tu as dû rencontrer plus de journalistes qu'il n'y a d'habitants à Marly-Gomont… Comment vis-tu cette déferlante, et à quoi ressemble ta vie aujourd'hui ?

          Ma vie ? La plupart du temps je suis en transit entre Paris et Marly : reportage sur Marly, interview à Paris… Sinon à Lille je bosse en tant qu'infirmier. Ca bouge quoi ! Mais c'est comme ça, il faut bien que j'assume ce que j'ai initié artistiquement, et ça passe par des sacrifices. Mais pour l'instant, je vais encore beaucoup à Marly !

          Tu as dit vouloir privilégier le média Internet pour faire ta promo : ça tombe bien… Peux-tu nous en dire un peu plus sur ton prochain single, l'album en préparation, tes projets… ?

          Je veux que mes vidéos passent d'abord par les internautes avant de les passer sur les chaînes. Je veux rester respectueux du public qui m'a fait. Je vais beaucoup communiquer via le web, envoyer des mails, rester proche des gens. Il y a toujours moyen de trouver un ordinateur pour envoyer un remerciement. Pour le contenu de l'album, on m'a déjà balancé, donc je peux continuer. Je peux dire qu'on retrouvera la même écriture, la dérision, l'autodérision, avec peut-être quelques chansons moins marrantes. Je mise surtout sur mon écriture et mes vidéos, qui sont un peu différentes de ce dont on a l'habitude, sur l'originalité. Moi je suis auteur, compositeur, interprète et réalisateur, donc je fais tout. Ca fait un bloc condensé d'authenticité, les gens n'ont pas à se poser de questions, et je pense qu'ils préfèrent ça. Je n'ai rien contre les autres procédés, mais ça ne me tente pas du tout. Moi j'écris tout, j'ai juste à vaincre ma timidité.

          Il paraît que tu n'as même pas Internet chez toi…

          Non… Quand ça a commencé, on faisait tout de chez Martin, mon manager. C'est d'ailleurs pour ça que le nom de sa boîte de production, La Plèbe, apparaît. Mais laissez-moi un mois et après je vous promets que je serai au point !

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